"Que le jour se lève : la mémoire en bagage" -
Le nouveau roman poignant de Cindy Triaire préfacé par Lara Fabian
Dans le dédale de nos vies, il est des chemins que nous sommes destinés à parcourir, des épreuves qui se dressent sur notre route, défiant notre résilience, notre amour, notre humanité. C’est dans ce labyrinthe d’émotions et de défis que nous plonge le récit poignant qui vous attend. Un récit qui puise sa source dans les profondeurs de l’âme humaine, dans les méandres de la maladie et de la douleur, mais qui s’élève aussi dans les hauteurs de l’amour, de l’espoir et de la rédemption.
Mais surtout, nous découvrons la force inébranlable de l’amour filial, cette lumière qui brille même dans les ténèbres les plus épaisses.
Ce roman n’est pas seulement le récit d’une expérience personnelle, mais un témoignage universel de la condition humaine. Car qui parmi nous n’a pas été touché, de près ou de loin, par la cruauté des maladies neurodégénératives ? Qui n’a pas ressenti cette impuissance déchirante devant la perte progressive de soi-même ou d’un être cher ?
Pourtant, au milieu de cette noirceur, une lueur d’espoir persiste. Car même dans les moments les plus sombres, il existe une beauté fragile à saisir, une leçon de vie à apprendre. À travers les pages de ce roman, on se rappelle que chaque instant, aussi éphémère soit-il, est précieux. Que même dans la tourmente, l’amour et la compassion peuvent fleurir, illuminant notre chemin de fragments de bonheur et de réconfort.
Que ce récit soit donc une ode à la vie, à sa fragilité et à sa force incommensurable. Une invitation à embrasser chaque moment avec gratitude et tendresse, car c’est dans la vulnérabilité que réside la véritable beauté de notre humanité.
Puissent ces mots toucher vos cœurs, éclairer vos esprits et vous rappeler, comme ils l’ont fait pour moi, que même au cœur de la tourmente, il y a toujours de la lumière à trouver.
Lara FABIAN
Chanteuse, autrice et compositrice internationale
Extrait
Prologue
03 octobre 2023,
Cher journal, un ami qui m’est cher m’a invitée à écrire. Écrire pour guérir, pour ne plus souffrir. Écrire pour me reconstruire. Je ne sais pas. Je me demande pourquoi. Pourquoi j’ai dit oui. Pourquoi j’en suis là.
Je te regarde, t’empoigne, et déjà j’ai peur du vide, du creux, de l’insipide. Tes feuilles, trop claires, certes, je voudrais les noircir. Mais de mots justes, de mots qui éclairent, qui incrustent le cœur et transpercent la chair.
Cher journal, j’ai mal. Mal de tenir ce stylo, mal de me livrer et que ça sonne faux.
Mais je crois en LUI. En son histoire, en sa personne, en cet espoir qu’il m’insuffle, ce soutien qu’il me donne. Il s’appelle Arthur. Et à ses côtés, la vie me paraît moins dure, plus douce, moins monotone.
Cher journal, advienne que pourra, je me dois d’avancer. Aussi, pardonne mes ratures, tolère mes doutes, supporte mes fêlures. Cette histoire est celle … de ma plus grande blessure.
*
Le soleil, qui depuis l’aube caressait les visages, avait cédé la place à la tourmente d’un vent froid, prenant les passants en otage. Le ciel, jusque-là parsemé de blancs nuages, se révélait désormais lugubre, digne d’une mauvaise farce. La ville, grouillante quelques instants plus tôt, semblait, de surprise, se vider de ses âmes.
Je me souviens du tonnerre venu ébranler la tôle, de la pluie diluvienne qui suivit, presque folle, et des égouts saturés, inondant les sols. Je me rappelle le vent, tout juste audacieux, devenu soudainement téméraire, et des troncs d’arbres, terrassés, arrachés à la terre. Je revois les panneaux, les feux rouges, les encarts publicitaires déchirer le goudron, virevolter dans les airs. Je me souviens de la terreur, de ce vertige, de cette chute libre au fond du cœur, lorsque les toits se sont mis à trembler, que les lignes électriques, rompues, se sont une à une embrasées.
Tout, tout en cet instant, laissait présager du pire. Et rien, rien de ce chaos n’est aisé à décrire.
Je me revois ainsi, terrifiée, néanmoins incrédule, convaincue d’une issue, assurée d’en sortir. Mais c’était sans compter sur la colère des cieux. Sans compter sur l’océan venu prêter main-forte aux dieux. C’est ainsi que je le vis arracher les digues, avalant la plage, noyant le rivage, recouvrant peu à peu les terres. L’océan, pourtant si calme, devenu soudainement fou, odieux, délétère.
Il ne lui aura fallu qu’un instant, tout juste quelques secondes, pour transformer les caves en tombeaux, les rez-de-chaussée en piscines, les allées en décombres.
C’est ce qu’il me reste de la Floride. Ce souvenir de l’horreur qui chaque nuit me hante. Un ouragan dévastateur, qui, dans son insolence, a happé ma sœur en son antre.
Chapitre 1
– Putain Zoé ! Qu’est-ce que tu fous ? J’te préviens ma belle, si tu bouges pas tes fesses de ce canapé, je vais finir par y foutre le feu !
– …
– Oh, j’te cause ! Tu pourrais au moins lever les yeux quand j’te parle ! Zoooooé, bon sang, on va être à la bourre !
– Fous-moi la paix ! J’irai pas !
– Bordel ! T’avais promis !
– Lâche-moi, j’te dis.
– Écoute Zou’, j’suis pas d’humeur. J’te laisse deux minutes pour enfiler un jeans, trois pour dompter ta crinière et quatre pour te ravaler la façade à grands coups de blush ! J’te préviens, à midi pétante, je te veux toi, ta dépression et ta mauvaise foi, le séant calé dans la bagnole !
– Ça suffit, Paul ! Dis à papa-maman que j’peux pas. C’est au-dessus de mes forces.
Pour la première fois, la voix du jeune homme se fit amère, cassante.
– Tu m’emmerdes ! Vous m’emmerdez tous à la fin ! J’en ai ma claque de jouer les pigeons voyageurs ! Réglez vos comptes une bonne fois pour toute, parce que j’en peux plus de ce silence. J’en peux plus Zoé. T’entends ? De ces non-dits, de ce merdier, de cet amas de souffrance.
– …
– Et puis tu veux quoi au juste ?! T’attends quoi de nous ? Qu’on te dise que c’est ta faute ? Que t’es un monstre ?
Cette fois-ci, Paul vit Zoé défaillir.
– Tu peux pas comprendre ! Elle était tout pour moi ! Tout ! Mais en lâchant sa main, je l’ai condamnée ! Je l’ai vu mourir. J’ai vu les flots l’emporter ! N’importe comment, j’aurais dû la retenir ! Ne me demande pas de faire semblant d’être en vie. Je suis morte, moi aussi !
Paul vit les mains de sa sœur trembler, ses yeux s’embuer.
– C’est ridicule Zou’ et tu le sais ! Des centaines de locaux et de touristes y sont restés. Tu peux pas honorer sa mémoire en faisant passer ton chagrin avant son courage ! Elle s’est battue. Elle a lutté. Jusqu’au bout, elle n’a rien lâché ! Et puis merde, t’es qui pour t’imaginer défier un ouragan de catégorie 4 ?
Paul marqua une pause, le souffle court :
– C’était il y a un an Zoé. Un an jour pour jour. Plus que jamais, papa et maman ont besoin de toi. J’ai besoin de toi ! Ils ont enterré leur fille aînée, ne les prive pas de leur cadette. Quant à moi, j’ai pas seulement perdu une sœur, j’ai perdu ma fratrie. Parce qu’au fond, je t’ai perdue toi aussi ! Zou’, secoue-toi, je t’en supplie !
Zoé encaissa le coup comme un boxeur au fond des cordes et dut s’appuyer contre le manteau de la cheminée pour ne pas flancher.
– Je te demande pardon. Un jour sans doute, je trouverai la force de me rendre sur sa tombe. Mais ce vide dans le cercueil, cette absence de corps dans le tombeau, c’est trop pour moi !
Zoé essuya d’un revers de main la larme qui perlait à ses joues :
– Elle était mon modèle, Paul, elle était mon ancrage. Romy était mon repère, mon idole. Dis-moi comment survivre à un tel naufrage ?
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